Ixora aoupinieensis Hoang & Mouly, 2007

Mouly, Arnaud & Hoang, Nathalie, 2007, Une nouvelle espèce d’Ixora (Rubiaceae) cauliflore de Nouvelle-Calédonie, Adansonia (3) 29 (1), pp. 123-128 : 124-127

Ixora aoupinieensis Hoang & Mouly , sp. nov.

( Fig. 1 )

Species monocaulis plus minusve rheophila, cauliflora , 0,5- 1,3 m alta, humiliter atque mediocriter erecta, caulibus unicis interdum parce ramosis, foliis 3-6 paribus decussatis ad summitates Fructus ad apicem insigne elongatus, valde 8 costatus: hic postremus character fructus ab omnibus speciebus neocaledonicis in generem Ixoram insignite differt.

TYPUS. — Nouvelle-Calédonie. Ponérihouen, forêt humide, exploitation forestière Devillers, haute vallée de Mou, 600 m, 25.IX.1969, fr., MacKee 20884 (holo-, P; iso-, K, L, NOU, P) .

PARATYPES. — Nouvelle-Calédonie. Mt Aoupinié , forêt humide, grauwackes, exploitation forestière Devillers, 500-600 m, 27.IV.1972, fl., MacKee 25368 ( K, NOU, P) ; fl., MacKee 25610 ( P) . — Mt Aoupinié , pente Est, forêt humide, grauwackes, exploitation forestière Devillers, 500-600 m, 27.IV.1973, fl., MacKee 26614 ( K, NOU, P) . — Mt Aoupinié , pente Est, forêt humide, grauwackes, exploitation forestière Devillers, 600 m, 8.IX.1976, fr., MacKee 31861 ( G, K, L, NOU, P) . — Mt Aoupinié , 800-1000 m, 7.IX.1976, fr., Morat 5111 ( NOU, P) .

DESCRIPTION

Arbuste de 0,5-1,3 m de hauteur, dressé, monocaule à faiblement ramifié, glabre dans les parties végétatives. Stipules triangulaires, carénées, 12-17 × 6-11 mm, acumen long de 2,5-9 mm, à collétères basaux en face interne. Pétiole plano-convexe ou faiblement canaliculé, long de 3-13 mm, robuste, articulé à la base. Limbe étroitement obovale, de 12-35 × 7-18 cm, coriace, face supérieure brune et faiblement discolore, face inférieure brun clair orangé in sicco; face supérieure vert foncé et face inférieure vert pâle in vivo; base tronquée; sommet obtus à faiblement acuminé; nervure primaire plane à faiblement canaliculée dessus, fortement saillante dessous; 15-22 paires de nervures secondaires, rases dessus, faiblement saillantes dessous; réseau tertiaire ± indistinct. Inflorescences cauliflores en glomérules généralement pluriflores, à l’aisselle des cicatrices foliaires, parfois jeunes inflorescences à l’aisselle des feuilles, fleurs (1)4-12(16); bractées réduites à des écailles étroitement triangulaires à subulées, longues de 2-2,5 mm; bractéoles 1 ou 2, foliacées, elliptiques-oblongues, de 7 × 2 mm, carénées, à stipules largement ovales à ovato-triangulaires, de 2 × 2 mm, à sommet membraneux, portant un acumen subulé, spinulescent, de 1,7-2,5 mm, ± distinctement récurvé, formant un calicule plus ou moins entier. Fleurs odorantes, subsessiles à pédicelle de longueur inférieure à 1 mm, à calice rouge ou rougeâtre in vivo, turbiné, 3,5-4,2 × 2- 3 mm; hypanthe long de 1-1,2 mm, glabre ou portant quelques poils; tube du calice, 2,1-2,3 mm de haut, évasé sur 1 mm, collétères présents en face interne, lobes de 1,3-1,5 mm, fortement dentés sur 0,8 -1 mm, parfois 1 ou 2 lobes surnuméraires réduits, nervures présentes entre deux lobes contigus et dans l’axe de chaque lobe; corolle blanche à base rose in vivo, hypocratériforme à tube long de 2,8-3,6 cm sur 1-2 mm de diamètre, lobes oblongs, de 7-16 × 3,5-6 mm, sommet aigu ± distinctement apiculé. Étamines à filet comprimé dorso-ventralement, 1,5-2,5 mm, filet droit in vivo, torsadé in sicco, coudé, anthères de 3,8-4 × 0,5-0,8 mm, à sagittation basale de 0,9-1 mm à extrémités stériles de 0,3-0,5 mm, connectif prolongé par un mucron stérile de 1,5 mm de longueur. Style long de 3,4- 4,5 cm, exsert sur moins de 1 cm, entièrement glabre; stigmate blanc in vivo, long de 2,1-2,6 mm fermé, claviforme, lobes longs de 1,8-2,4 mm, ouverts sur 1,1 -2,2 mm de large, récurvés à maturité; disque nectarifère non lobé haut de 0,5-0,8 mm environ; présentation secondaire du pollen. Fruit vert à extrémité rouge, subsphérique à ellipsoïde, rétréci à la base, de 1,4-1,8 × 0,8-1 cm (hors rostre et calice), de maturité incertaine, remarquable par les nervures, au nombre de 8, formant des côtes épaissies et un rostre formé du disque et du calice accrescents, long de 1,5-1,6 cm, pédicelle long de 2-3 mm. Pyrène ovoïde, de 8-9 mm de long, large et épais, de 5 mm, pointe apicale courte, surface assez lisse à légèrement rugueuse, non côtelée, insertion funiculaire centrale, oblongue. Graine probablement immature, ovoïde à ellipsoïde, comprimée latéralement, 4,5-5,5 × 3-3,7 mm, irrégulièrement ridée-côtelée, subailée dorsalement.

DISTRIBUTION, ÉCOLOGIE

ET STATUT DE CONSERVATION

Ixora aoupinieensis est une espèce forestière ripicole ou poussant sur sol humifère et roches sédimentaires (grauwackes) très humides, apparemment restreinte aux massifs proches de Ponérihouen, dans la haute vallée de Mou en remontant le flanc est du Mt Aoupinié et à la Tchamba (cette deuxième localité n’étant répertoriée qu’à partir de photographies, sans récolte d’herbiers associée), entre 500 et 1000 m d’altitude. Les individus semblent fleurir fin avril-début mai et fructifier de mai à septembre. Cette espèce reste très mal connue en raison du peu de récoltes dont elle a fait l’objet. Il serait à l’avenir intéressant de vérifier s’il n’existe pas une corrélation quelconque entre le mode de vie rhéophyte de la plante et la morphologie externe de celle-ci, par exemple pour faciliter la dispersion par l’eau. Il semble aussi que les parties florifères et fructifères de la tige sont les zones potentiellement immergées lors du gonflement du cours d’eau par les pluies, ce qui conditionnerait considérablement la phénologie de l’espèce. Souvent, les espèces de plantes rhéophytes possèdent un appareil racinaire et/ou rhizomatique développé, permettant un fort ancrage dans le substrat pour résister aux courants et également d’avoir d’importantes réserves d’eau pendant la période sèche. Ces organes n’ont pas fait l’objet d’observations chez cette espèce jusqu’à présent.

L’aire d’occupation et d’occurrence d’ I. aoupinieensis est très réduite et la plante est connue de très peu de localités. La «réserve » de l’Aoupinié et la forêt de la Tchamba sont actuellement exploitées pour le bois, ce que l’on doit considérer comme une réduction de l’habitat. La zone qui connaît une forte augmentation de la population de Cervidae , notamment en forêt humide, est soumise à une forte pression de dégradation. Les cerfs sont maintenant couramment reconnus comme une menace pour les plantes endémiques du territoire (de Garine-Wichatitsky et al. 2005). Malgré le manque de connaissance de la répartition réelle de la plante, de son écologie et de sa phénologie, notamment dû au manque de prospection ( Jaffré 2003), il apparaît opportun au regard des menaces qui pèsent sur la flore néo-calédonienne, d’établir dès à présent un critère de classification de la plante ( Callmander et al. 2005).

Catégorie sur la liste Rouge de l’IUCN: En Danger (EN; B1a, b; B2a). B1: l’étendue totale de l’aire d’occupation de l’espèce est inférieure à 5000 km 2 (c. 50 km 2); a(ii), très fragmentée, et existant dans moins de cinq localités; b(i-iii), aire en constant déclin; B2: l’étendue totale de l’aire d’occurence de l’espèce est inférieure à 5000 km 2 (c. 100 km 2).

CLÉ D’ IDENTIFICATION

La clé d’identification des représentants néo-calédoniens du genre Ixora , proposée par Guillaumin (1948) est ici émendée pour partie:

1. Plantes cauliflores ....................................................................................................... 2

— Plantes non cauliflores ................................................................ cf. Guillaumin (1948)

2. Hypanthe inclus dans un calicule ne dépassant pas le tube du calice; fruits côtelés ........ .............................................................................................................. I. aoupinieensis

— Hypanthe libre, axilé par des bractées réduites; fruits lisses ......................................... 3

3. Bractées du pédicelle soudées naviculiformes; pédicelle au moins aussi long que l’hypanthe; calice toujours glabre ......................................................................... I. kuakuensis

— Bractées du pédicelle libres, arrondies et légèrement cordées; pédicelle au plus deux fois plus court que l’hypanthe; calice généralement pileux, rarement glabre ...... I. cauliflora

Figures

FIG. 1. — Ixora aoupinieensis Hoang & Mouly: A, port général de la plante dans son milieu naturel; B, feuille,face inférieure; C, calicule floral; D, fleur à l’anthèse; E, étamines,vue de face (gauche),vue de dos (centre),vue de côté (droite); F, pyrène, vue de face (gauche), vue de dos (droite); G, détail de la tige fertile présentant l’aspect de l’infrutescence et des fruits,ainsi que des inflorescences naissantes; H, détail de coupe transversale à mi-fruit.A, d’après photographie Irène & Daniel Létocart et observation de terrain du premier auteur; B-E, MacKee 26614; F-H, MacKee 20884. Échelles: A, 15 cm; B, 2 cm; C, G, 1 cm; D, 12 mm; E, 2 mm; F, 4 mm; H, 7 mm.